dimanche 30 août 2015

Avertissement

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Pour cela, les dates d'édition ont été modifiées, les articles plus anciens devenant les premiers à la lecture. Ce qui fait que la mention de bas de page "articles plus anciens" renvoie en fait aux articles suivants, plus récents.

L'introduction de Jean-Marie Mengin


GR 9

Sentier Jura – Côte d’Azur

(Saint-Amour – St-Pons-les-Mûres)

-918 km-



Le GR 9 relie le Jura à la Côte d’Azur. Provenant de Saint-Amour, dans la plaine de Bresse, il traverse le massif du Jura d’ouest en est puis vers le sud. Il s’attaque ensuite aux Alpes par les Préalpes du Nord (massifs de Chartreuse et du Vercors), les Préalpes du Sud (Diois, Baronnies, Ventoux, plateau de Vaucluse, Lubéron, montagne Sainte-Victoire, massif de la Sainte-Baume). Il se termine dans le massif des Maures, au bord de la Méditerranée.
Il traverse les parcs naturels régionaux du Haut Jura, de Chartreuse, du Vercors et du Lubéron.

J’ai parcouru ce sentier de novembre 1999 à avril 2007, seul, de temps en temps avec Oscar (surtout au début), et retrouvant Viviane aux étapes.

J’ai effectué cet itinéraire d’abord comme sentier de proximité d’un jour ou d’un week-end dans sa traversée du Jura où nous habitions alors. Je l’ai pratiqué  par périodes plus longues d’une semaine ou plus, dans sa traversée des Alpes et des Maures.


https://gr9dejmmengin.blogspot.fr


Lundi 1er novembre 1999 : Saint-Amour – Saint-Julien-sur-Suran.

C’est à Saint-Amour (département du Jura) que débute le GR 9.
Dans la plaine de Bresse, au pied du Jura, c’est l’une des plus anciennes cités de Franche-Comté (connue depuis le VIe siècle).
Le GR 9 commence à la gare et traverse toute la cité d’ouest en est. Il gagne Allonal, un hameau fleuri.
Avec notre chien Oscar, un jeune golden retriever, je commence à marcher dans la matinée sur les flancs du Revermont, bordure viticole occidentale de l’escalier du Jura.
Dans un premier temps, le GR 9 va, d’ouest en est, monter des plaines de la Bresse jusqu’aux plus hautes cimes séparant la France de la Suisse.
Il fait une douceur exceptionnelle en ce jour de la Toussaint. Nous gagnons Villette puis Nanc-lès-St-Amour, sur les premières collines du Revermont. Vue sur la Bresse. Nous longeons l’église St- Martin, monument historique, et le château du XIVe siècle.
Le GR grimpe alors rudement en forêt. Le balisage blanc et rouge, ancien, laisse à désirer. Le GR 9 rejoint au sommet du plateau (523 m) le GR 59. En un parcours commun, les deux GR atteignent les ruines de Bellevue et poursuivent jusqu’à un abri forestier où ils se séparent. Le GR 9 continue vers l’est en forêt et débouche sur Thoissia, en Petite Montagne.
La Petite Montagne : ce petit pays, à l’écart des routes fréquentées, entre Revermont et vallée de l’Ain, est formé d’anticlinaux et de synclinaux, plis parallèles séparés par des dépressions, à l’instar des hautes chaînes du massif.
Oscar et moi traversons le village et par la route gagnons un premier chaînon que nous allons attaquer dans sa largeur jusqu’à Andelot-Morval. Nous contournons les murailles du château d’Andelot, terminé en 1158, dont subsistent un donjon et deux tours du portail. Aujourd’hui c’est une maison d’hôtes raffinée.
On traverse la rue principale du village pour retrouver le Trafic de Viviane, stationné devant une maison. Nous buvons l’apéritif chez un de ses collègues (chasseur !) du bureau de poste d’Arinthod. Puis nous allons manger non loin de là dans le fourgon. S’il n’y avait le vent, nous pourrions nous installer à l’extérieur.

Ensuite, je reprends, seul, mon itinéraire qui grimpe au milieu des buis, omniprésents dans le massif jurassien. Je traverse du nord au sud le bois de Charney, gagne des friches calcaires buissonnantes. A nouveau en forêt, je franchis la Côte Renaud pour atteindre la route départementale qui mène à Saint-Julien.
J’atteins la vallée du Suran, une des deux rivières avec la Valouse qui structurent la Petite Montagne du nord au sud. Au milieu des prés et des pâtures, je gagne le Suran que je franchis sur un petit pont à hauteur d’un ancien moulin. En face de moi, arrivent à ma rencontre Viviane et Oscar.
Ensemble nous gravissons la butte de Saint-Julien-sur-Suran jusqu’au cœur du bourg, chef-lieu de canton, ancien point fortifié au bout d’une crête allongée.

Nous rentrons à Arinthod vers 16h.

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Dimanche 21 novembre 1999 : Saint-Julien-sur-Suran – Les-Granges-de-Dessia.

En début d’après-midi, Viviane m’emmène à Saint-Julien, après que nous ayons laissé une voiture aux Granges-de-Dessia.

A 14h, je marche avec Oscar au départ de Saint-Julien.
Le GR 9 fait trajet commun avec le GR de pays Tour de la Petite Montagne qu’il rencontre sur la place principale. Les GR sortent de St-Julien sur des chemins enneigés. Après la D3 St-Julien – Arinthod, ils s’enfoncent dans les prés entre des clôtures. L’épaisseur de neige devient importante. Devant un enclos de chevaux qui viennent faire connaissance avec Oscar, je m’arrête pour chausser mes raquettes de neige.
On gagne la forêt. L’étroit sentier s’enfonce sous le couvert. Oscar s’amuse comme un fou dans la neige. J’évite de le laisser s’éloigner, de crainte qu’il ne débusque un sanglier dont je viens de repérer les traces. A la sortie du bois, nous débouchons dans de vastes prairies immaculées.
A l’entrée de Lains, j’enlève les raquettes pour traverser le village, et on croise à nouveau la route St-Julien – Arinthod. On poursuit sur une petite route revêtue jusqu’à la séparation d’avec le GR de pays.
Le GR 9 traverse des champs et se dirige vers Grand Lancette, un hameau situé au pied d’un nouveau chaînon. Un sentier étroit s’engage entre deux murs de maisons et gravit la côte en pente raide. Les buis croulent sous le poids de la neige. Je chausse à nouveau les raquettes.
On débouche sur une crête à 595 m, dans une prairie. L’épaisseur de neige atteint 70 cm. Oscar peine à avancer dans la neige qui le recouvre partiellement. Le balisage aussi disparaît. Après quelques hésitations, c’est à la boussole que je retrouve la bonne direction, de l’autre côté de la prairie. Encore quelques bosquets, et on arrive à 16h aux Granges-de-Dessia où Oscar retrouve la voiture, stationnée à proximité de la D3.

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Dimanche 28 novembre 1999 : Les-Granges-de-Dessia – Dramelay.

Navette avec deux voitures.

C’est avec Viviane et Oscar que je vais effectuer cette courte étape au départ des Granges-de-Dessia.
A 10h du matin, par un beau soleil, nous quittons le hameau sur un chemin agricole qui traverse la combe, se dirige à l’est parmi les prés et les bosquets encore enneigés. Oscar se roule dans la neige.



Dans la Côte, nous bifurquons trop vite dans des pâtures. Il nous faut rebrousser chemin pour atteindre la crête. On va suivre vers le nord la large piste qui se poursuit sur le crêt à travers les pâtures dans les rocailles calcaires, puis sous bois dans les buis, les pins et les feuillus.
Nous atteignons les ruines du château de Dramelay (590 m), un peu en dehors du sentier. Il en subsiste une tour datant du XIIIe siècle, en cours de rénovation par des chantiers de jeunesse. On y trouve l’emplacement du donjon, d’un corps de bâtiments et de diverses fortifications. 


Belle vue sur la vallée de la Valouse et Arinthod. Le bourg et le château furent détruits par les troupes de Louis XI.
On arrive un peu plus loin dans les vestiges de l’ancien village qui resta habité jusqu’en 1944. Aujourd’hui, ce sont des ruines abandonnées dans la végétation qui a repris ses droits. L'ancienne chapelle du village est toujours debout, dégageant une atmosphère étrange et pesante. On dit d’ailleurs que cette chapelle médiévale a été rénovée par l’Ordre du Temple solaire, sous le couvert d’une association.


Franchissant la crête, nous descendons le long du versant est, rejoignons un fond de vallée. Par un chemin rural, nous gagnons Dramelay, le village actuel, où nous retrouvons à 11h45 devant la fontaine une de nos voitures.

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Dimanche 9 janvier 2000 : Dramelay – Arinthod.

Viviane m’emmène à Dramelay pour 10h.

La neige a disparu. Je quitte Dramelay avec Oscar.
Le sentier traverse un bois et débouche dans des friches où sont postés des chasseurs. Viens, Oscar, on se dépêche !
Un peu plus loin, comme il refuse de passer, je dois balancer Oscar par dessus une rangée de barbelés. On arrive au hameau de Sésigna, lieu d’un fait divers il y a quelques années : prise d’otage de la famille par un homme en cavale…
Traversant à nouveau la D3, on se dirige dans des prairies au balisage incertain. Par une large boucle, on atteint la vallée de la Valouse.
On chemine le long de la rivière où des bûcherons sont occupés à débarrasser la forêt des chablis de la grande tempête de Noël. Oscar se roule dans la boue, mais heureusement la Valouse lui permet d’aller prendre un bain. Le GR 9 rejoint la route dans un grand virage et traverse la rivière à hauteur du moulin d’Arinthod. On longe les bâtiments puis on grimpe dans les buis pour atteindre des prés.
On est là sur le plateau de la Valouse, recouvert par les dépôts de l’ancien glacier jurassien qui descendait des hautes chaînes. Le chemin retrouve la route puis bifurque à travers prés pour gagner Arinthod.
Ancienne cité fortifiée, le village a conservé en partie l’aspect du bourg médiéval : place centrale bordée de maisons à arcades, avec une fontaine datant de 1750. Les fossés comblés sont devenus des jardins.


Contournant le village, Oscar et moi arrivons non loin de la Poste, où habite Viviane depuis 1993. Nous rentrons à 12h15 à la maison. Nous allons y passer l’après-midi.


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Dimanche 13 février 2000 : Arinthod – vallée de l’Ain.

Je quitte la Poste à 13h45 avec Oscar, pour grimper vers l’est au-dessus d’Arinthod, sur les flancs rocailleux et arides du dernier plissement oriental de la Petite Montagne.
Recoupant de nombreuses fois la D3, le GR 9, sous une pluie fine, chemine dans les buis et les genévriers, grimpe sur les hauteurs du cirque de la pierre Enon et continue dans les bois pour rejoindre une combe parallèle. Les chemins sont boueux. A hauteur de la Grosse Ferme, on grimpe à nouveau vers un crêt. Il pleut toujours. Les buis sont couverts de lichens.
A une altitude de 616 m, le GR 9 rencontre encore le GRP de la Petite Montagne. On domine la vallée. Quelques centaines de mètres plus loin, le GR 9 dévale en lacets puis arrive à Menouille, dans la vallée de l’Ain, terminant ainsi son parcours à travers la Petite Montagne.
On traverse le village et on se dirige vers l’Ain. Encore un bon bain pour Oscar. Traversant la rivière sur un pont routier, on retrouve à 17h10 sur l’autre rive Viviane venue nous rechercher.

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Dimanche 9 avril 2000 : Vallée de l’Ain – Moirans-en- Montagne.

Départ avec Oscar depuis le pont sur l’Ain, à 10h, sous un ciel gris.
Le GR 9 pénètre dans le parc naturel régional du Haut Jura. Le sentier longe la rive gauche de la rivière, monte vers un plateau marécageux et, bordé d’arbres et de buissons, rejoint dans les prés le village de Vouglans. On traverse la localité pour se diriger par une petite route vers le barrage de Vouglans.
Construit sur l’Ain de 1963 à 1968, il retient un lac artificiel de 35 km de long occupant 1600 ha, troisième retenue de France.
On y rencontre le GRP Tour du lac de Vouglans. Les deux GR longent la rive gauche du lac par une route forestière empierrée en surplomb puis montent à travers bois par une pente assez forte. Ils rejoignent une route forestière à 632 m et se séparent.
Le GR 9 emprunte un chemin d’exploitation et rejoint après quelques vallonnements la route forestière à la Grange Neuve. Un sentier dans les buis traverse le Murgin et monte à la route de la Refraîche, près de la grange Marleille. Nouvelle rencontre du GRP.
Nous empruntons alors un sentier qui bientôt débouche entre des haies, dans un pré, contre la rocade de Moirans. On la traverse par un tunnel sous la route. Un chemin de terre nous amène près d’un cimetière à l’entrée de Moirans-en-Montagne. C’est la capitale française du jouet, située sur un plateau central du « pays des lacs ». On y retrouve Viviane à 13h30.

Nous rentrons alors à Saint-Claude où nous habitons depuis le début du mois.

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Dimanche 16 avril 2000 : Moirans-en-Montagne – Ravilloles.

A 9h30, je quitte Moirans-en-Montagne avec Oscar.
Nous rencontrons le GRP Tour de la Région des lacs. Après avoir traversé la route départementale qui se dirige vers Les Crozets, nous empruntons un sentier très raide qui part dans le bois à l’assaut d’un crêt longitudinal. Un chamois s’élance par-dessus le sentier, s’éloigne dans les rochers. Oscar réagit avec un peu de retard et exécute quelques allers et retours excités, en vain !
On arrive sur la route forestière des Combettes, au lieu-dit les Communs, où Oscar s’était fait agresser l’an dernier par un briard noir, alors que nous parcourions le GR de pays. On est sur l’ancienne voie du tacot qui reliait Lons à Saint-Claude.
A 100 mètres de là, le Pont des Arches est l’un des plus importants sites archéologiques de France. Je me dirige vers le site, grillagé. C’est un sanctuaire de la Séquanie romaine. Il abrite les vestiges de temples gallo-romains ainsi qu’un véritable complexe balnéaire relié au lac d’Antre.
Je reviens à la ferme. On entend aboyer le chien, toujours là !
On prend alors à l’est un chemin qui traverse le ruisseau d’Héria, monte en forêt, coupe une route forestière. Et on la suit jusqu’au lac d’Antre : dans une combe entourée de forêts, les eaux mystérieuses du lac sont surplombées par une roche noire, site sonore intéressant et lieu de nichage du faucon pèlerin. Il porte le nom d’une antique cité celte qui a disparu totalement.
Nous contournons le lac par le nord. Le GR 9 et le GRP quittent le fond de la combe et s’élèvent dans la forêt sur un bon chemin forestier sans grand dénivelé. On atteint une ferme, la Grande Maison, dans des prairies à 840 m : paysage de tourbières et pâtures défrichées. On poursuit jusqu’à une intersection avec une route goudronnée au sud du hameau Sur Montmain. Se séparant du GRP de la Région des lacs, le GR 9 descend en pente raide vers Ravilloles
Nous y avons rendez-vous à 12h30 avec Viviane, venue nous rechercher.

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Dimanche 23 avril 2000 : Ravilloles – La Rixouse.

Départ de Ravilloles avec Oscar à 9h15.
Cette portion du GR 9 jusqu’à la vallée de la Bienne va m’être impartie comme secteur de balisage à partir du mois prochain : collaboration entre la Fédération Française de Randonnée Pédestre et le parc naturel régional du Haut Jura.
Le sentier se dirige vers le lac de Ravilloles qu’il contourne. Il monte par un chemin raide et rejoint la D118. Le balisage est actuellement malmené par des travaux. Nous grimpons alors la côte de Vichaumois jusqu’au hameau éponyme. Suivant la même orientation, nous continuons dans la forêt. Après une montée régulière, on débouche dans des prairies : vue sur les hautes chaînes du Jura qui étirent leurs plis parallèles en un paysage grandiose.
A partir du hameau Sur la Côte, on commence à descendre dans la vallée de la Bienne, long sillon qui entaille le socle jurassien en une profonde tranchée. Nous sommes sur un ancien parcours de moutons, versant sec où la végétation buissonnante pousse sur un sol aride. Escaladant un portillon qui empêche le passage des bêtes, on va suivre un large chemin empierré qui chemine sans dénivelé sur le versant. Je reconnais l’endroit où Viviane et moi avions dormi le 24 mai 1997 lorsque je parcourais le GR 559.
Le chemin rejoint la route de Saint-Claude à Saint-Laurent (que j’emprunte tous les jours depuis le début du mois pour aller travailler à Saint-Laurent). On arrive au village de La Rixouse à midi.

Nous allons attendre sous la pluie pendant une heure que Viviane vienne nous chercher, suite à une panne de voiture.

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Lundi 24 avril 2000 : La Rixouse – Rosset.

Le lendemain : lundi de Pâques.
Navette avec deux voitures : Viviane nous laisse à La Rixouse pour 15h15.

Je traverse La Rixouse avec Oscar. Le sentier poursuit sa descente vers la Bienne, dans les prés, évitant Villard-sur-Bienne que l’on contourne par le sud. On franchit la voie ferrée Andelot – la Cluse à un passage à niveau isolé, et l’on plonge sous les falaises qui enserrent la Bienne. On traverse la rivière tumultueuse sur un petit pont de pierre, le pont de Longchaumois.
C’est ici que se terminera mon futur secteur de balisage.
Le GR va maintenant remonter l’autre versant sur les flancs des monts de Bienne, vers les hautes chaînes du Jura plissé : chemin raide sous forêt, avec un balisage peu fiable.
Nous débouchons sur un plateau et  poursuivons à travers les pâtures jusqu’au ruisseau de la Gire, pour entrer dans Longchaumois (900 m), ville natale du héros franc-comtois Lacuzon qui lutta contre le rattachement de la Franche-Comté à la France.
Des pelouses sèches aux tourbières et aux lacs, des haies de buis aux bois de résonance, d’une flore méditerranéenne aux espèces arctiques, le Haut Jura présente une nature riche et contrastée. C’est aussi, depuis les défrichements du Moyen Age, une montagne habitée où se sont développées les activités artisanales et industrielles.
L’altitude augmente. Le GR 9 chemine dans les prairies en fleurs sous un soleil printanier, coupant ou empruntant plusieurs fois une route départementale. Sur le trajet, il passe à côté d’une habitation dont le toit est couvert de végétation isolante. Après la ferme de Tavaillonnette, il continue jusqu’à Rosset (1020 m), petite station de ski.
C’est là qu’on retrouve Viviane à 18h30.

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Dimanche 30 avril 2000 : Rosset – Prémanon.

De retour à Rosset où Viviane me dépose, je marche avec Oscar à partir de 16h15.
Après la dernière ferme, nous montons à travers une pâture puis entrons en forêt. Nous nous dirigeons à tort vers les fermes de Ripaille, dans une grande prairie. Nous faisons demi-tour pour cheminer sur la lisière.
Nouveau parcours forestier. On atteint l’altitude de 1129 m. Apercevant des plaques de neige, Oscar se précipite pour s’y rouler avec plaisir. Le chemin en pierre pénètre encore en forêt et, partiellement enneigé, passe vers des chalets abandonnés, se dirige vers le mont Fier. Au pied du mont, il quitte provisoirement le parc naturel régional et descend dans une clairière humide vers le fond de la combe du Mont Fier. L’eau stagne dans la prairie rendue glissante, la descente est délicate.
On rejoint un chemin revêtu qui mène à Prémanon, station touristique d’été et d’hiver. Partout dans la prairie fleurit le crocus, et dans les endroits humides la caltha des marais.
Viviane arrive à notre rencontre avec le Trafic à 18h30.

Nous envisageons alors de chercher un endroit pour la nuit. Nous allons nous installer dans un camping-caravaneige, à l’entrée de la combe de Lamoura, près de l’école nationale de ski des Jacobeys. 

Lundi 1er mai 2000 : Prémanon – chalet de la Frasse

A 9h15, je repars de la station ensoleillée de Prémanon, toujours avec Oscar.
On suit la route dans les prairies jusqu’à Prémanon d’Amont. On descend alors en forêt pour traverser le bief de la Chaille. Sur le trajet, une passerelle a été emportée par la neige ou les eaux.
Le GR 9 rejoint après une brève montée le GR 5 (sentier Mer du Nord – Méditerranée) à l’auberge de jeunesse du Bief de la Chaille. Dans une pelouse d’altitude, les GR traversent le ruisseau devant des fermes et remontent jusqu’au refuge de la Grenotte. Ils atteignent la D29. Le GR 5 monte vers La Cure et la frontière franco-suisse. Le GR 9, lui, se dirige sur une route en face, bifurque dans une pâture, passe une clôture et monte une piste de ski raide et sans intérêt. Se faisant, il quitte l’orientation générale  ouest – est qu’il suivait depuis son origine et s’oriente maintenant vers le sud, dans le sens des crêtes de la haute chaîne.

La neige fait peu à peu son apparition sur la piste. Nous débouchons à l’arrivée du téléski des Tuffes. Nous poursuivons sur une lisière qui longe la cassure marquant l’extrémité nord de la forêt du Massacre. Le GR arrive alors au belvédère des Tuffes puis au belvédère des Dappes (1400 m) : panorama sur la haute chaîne et le dôme de la Dôle. Le site est complètement enneigé. Oscar se glisse derrière la palissade du belvédère, le long du précipice. Affolé, il ne sait plus s’en sortir. Je le crochète avec la laisse et le hisse de l’autre côté.
La forêt du Massacre doit son nom au massacre de mercenaires français par les soldats du duc de Savoie en 1535. Par son altitude, la forêt du Massacre est la plus enneigée du massif jurassien. La hauteur maxi avoisine régulièrement les trois mètres de neige chaque hiver. La durée d’enneigement est également remarquable.
Il y a encore aujourd’hui une forte épaisseur de neige. Une neige où l’on marche avec difficulté, les chaussures s’enfonçant brusquement sous la première couche gelée. Je n’avais pas prévu cela, omettant d’emporter avec moi mes raquettes.
Le GR s’enfonce sous forêt, traverse une clairière allongée et arrive dans une combe déboisée. Là où la neige a fondu poussent des crocus et des nivéoles. Le sentier rejoint la route forestière des Tuffes à proximité d’une cabane, le chalet des Tuffes. Il va maintenant cheminer parallèlement à la route. Il y a de plus en plus de neige : Oscar peine, s’enfonçant par endroits jusqu’au ventre. On croise des promeneurs en raquettes, plus prévoyants que moi !
Nous pénétrons à nouveau dans le parc naturel régional. On va marcher sur la route forestière enneigée pendant presque deux kilomètres jusqu’à la croisée Pierre de la Baume. De là on rejoint le carrefour de la Frasse puis une clairière où se situe le chalet de la Frasse (1290 m).
C’est là que nous avions rendez-vous avec Viviane, mais la route est impraticable.

On descend alors sur la petite route partiellement enneigée qui nous mène dans la combe de Lamoura. On retrouve Viviane qui nous attend sur la D25, à 13h40.
Nous mangeons sur place dans la nature, à l’intérieur du Trafic, avant de rentrer à St-Claude.


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Dimanche 23 juillet 2000 : Chalet de la Frasse – le Chalet Vert.

Aujourd’hui, c’est avec ma fille Caroline (23 ans), venue en vacances, que je vais marcher sur le GR 9.
Le chalet de la Frasse est notre point de départ, dans une clairière à la végétation exubérante d’un mois de juillet.
A 10h20, nous montons en forêt vers le carrefour des Auvernes. Puis le GR gravit le flanc nord du crêt Pela. On arrive au sommet (1495 m), envahi par la forêt qui a repris ses droits. C’est le point culminant du département du Jura et de la Franche-Comté.
Nous nous reposons un instant à la borne sommitale. Des promeneurs nous rejoignent avec des chiens. Du sommet nous descendons vers le sud-est. On trouve des lis martagons qui poussent dans le sous-bois. On croise une dame qui a cueilli une de ces fleurs rares : il y a encore du travail de sensibilisation à faire !
Forte descente ensuite pour rejoindre la route forestière des Forêts Monts (1370 m) qui traverse la forêt du Massacre. Les grandes gentianes sont en fleurs dans les prés-bois.



Le pré-bois est la forme d’occupation du sol la plus connue du Jura. Les fonds de vals ont été déboisés par l’homme et mis en prairies, les pâturages ont été gagnés aux dépens des hêtraies d’altitude et des hêtraies-sapinières. Un peu partout subsistent des bouquets d’arbres de petite taille. Impression d’harmonie renforcée par le cadre sombre des forêts et les fermes à larges toits…
Le GR quitte la route et descend vers le chalet de la Combe à la Chèvre. Il traverse des pâtures où estivent des troupeaux, et il monte par un sentier herbeux. On va maintenant suivre une très jolie combe longitudinale, majestueuse, à l’image des hautes combes jurassiennes.



Nous arrivons dans les pâturages de la Regarde. Le temps se couvre. Après la ferme, on continue en fond de combe et on atteint le Chalet Vert, hangar agricole au bord de la route forestière. La pluie commence à tomber lorsque nous arrivons au chalet. Escaladant les barbelés, Caroline et moi, nous  nous réfugions sous l’auvent du toit pour sortir le casse-croûte. La pluie s’arrête un peu plus tard, nous permettant de continuer.

Par d’autres sentiers, nous montons au nord vers le crêt surplombant la combe. Nous rejoignons la variante GR 9B qui nous ramène, sous un soleil réapparu, à notre point de départ. Nous buvons un pot au chalet de la Frasse avant de rentrer.

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Jeudi 7 septembre 2000 : Le Chalet Vert.

A 17h30, arrivés en Trafic, Viviane et moi nous installons avec Oscar auprès du Chalet Vert. Nous y passons la soirée et la nuit à côté des troupeaux en pâture.

Vendredi 8 septembre 2000 : Le Chalet Vert – col de la Faucille.

Lorsque nous nous levons, l’herbe est givrée tout autour de nous. Il a gelé cette nuit. La brume se lève doucement sur la combe, laissant place au soleil.
Je pars à 8h50 avec Oscar, longeant un muret qui s’éloigne dans les pâturages. Oscar se roule dans la pelouse givrée. On traverse des clôtures aménagées pour le passage et on rejoint la Sermangindre, une ferme au bord de la route empierrée.
On emprunte un peu plus loin un chemin forestier sur le crêt longeant les hauteurs du val de Mijoux. On arrive à Trécombe, une ferme isolée. Ensuite, c’est la plongée vers le val de Mijoux : on coupe plusieurs fois la route St-Claude – Genève et on arrive à Mijoux (990 m), dans la vallée de la Valserine.
Formidable brèche à travers le massif, cette profonde vallée, aux rives de laquelle s’accrochent de noires forêts, sépare la plus haute marche des hauts plateaux du Jura de la barre puissante de la Faucille et du Grand Crêt d’Eau (entre lesquels culmine le Crêt de la Neige).
Le GR 9 traverse la Valserine à l’entrée de Mijoux sur le pont Charlemagne, antique frontière aux confins de l’empire carolingien. Ce faisant, il pénètre dans le département de l’Ain.

On traverse le village où Oscar rencontre un copain, et on bifurque sur un chemin empierré. Une pancarte indique que le GR 9 est coupé dans la montée. Je décide de continuer quand même ! Avec Oscar je gravis les flancs abrupts de la barre de la Faucille. Mais bientôt, effectivement, il faut se rendre à l’évidence : le chemin est barré d’un grillage infranchissable entre une falaise et un précipice. Probablement des travaux dus à un effondrement…
Il faut faire demi-tour, redescendre à Mijoux. Le téléphérique, conseillé pour pallier au passage, est déserté. Au mois de septembre, déjà ! Par mon nouveau téléphone portable, je joins Viviane qui m’attend au col. Un quart d’heure plus tard, elle me rejoint à Mijoux avec mon frère Pierre et ma belle-sœur Sylvie. Nous montons en voiture au col de la Faucille (1323 m), point de passage vers la plaine genevoise, et limite de l’ancienne zone franche du pays de Gex.

Nous mangeons ensemble dans la nature près du col et y passons l’après-midi : jeu de pétanque puis, dans la soirée, pot en terrasse d’un restaurant. Pierre et Sylvie nous quittent à 18h pour redescendre à Saint-Claude où ils occupent notre appartement. Quant à nous, nous dormons sur place dans le Trafic.

Samedi 9 septembre 2000 : Col de la Faucille – Lélex.

Nous prenons le petit déjeuner dans un hôtel au col de la Faucille.

A 9h, je reprends mon parcours, seul. L’itinéraire est commun avec le GR « Balcon du Léman ».
Je passe devant la gare de départ d’un téléski, je suis une route revêtue. L’altitude augmente, par un sentier dans la forêt.
A partir du chalet le Crozat, le GR quitte la forêt, s’élève dans les alpages jusqu’au sommet du Mont Rond (1596 m). Et là, je découvre une vue saisissante sur les Alpes, le pays de Gex et le lac Léman. J’aperçois au loin le jet d’eau de la ville de Genève, au bord du lac. Derrière moi, des randonneurs avec un âne font une pause, d’autres entreprennent de gravir le mont.
Je vais suivre maintenant la ligne de crête pendant trois kilomètres au milieu des alpages et des troupeaux. Franchissant une clôture, j’entre dans la réserve naturelle de la Haute Chaîne du Jura. Créée en 1993, elle englobe les crêtes et les versants de la vallée de la Valserine et du pays de Gex. Soumise aux rigueurs climatiques, sa végétation rase est fragile ; et l’intégrité des biotopes doit être protégée de la fréquentation croissante des espaces de montagne…
J’atteins le sommet du Colomby de Gex (1688 m). Je m’assois dans l’herbe avec d’autres randonneurs, au milieu des troupeaux de montbéliardes, pour jouir d’un panorama exceptionnel sur les Alpes. Je repars ensuite, toujours sur la ligne de crête, le long d’un muret de pierres. Descente vers un col, remontée jusqu’à un sommet de 1630 m.
Le sentier s’abaisse jusqu’à un chemin empierré, quitte la réserve naturelle et arrive au col de Crozet, près de la télécabine de la Catheline (1450 m). Quelques chasseurs semblent me narguer… En face, le GR Balcon du Léman se poursuit vers le Crêt de la Neige, sommet du massif du Jura à 1717 m. Le GR 9, lui, entreprend de redescendre, à travers la piste de ski par un large chemin, vers la vallée de la Valserine. Il arrive au refuge du C.A.F. (Club Alpin) du Ratou. La descente s’accentue, sur un chemin en pente forte sans intérêt. Parcours difficile. Je butte contre les cailloux qui glissent sous les chaussures. Des jeunes montent en sens inverse en suant. Ils ne savent pas encore ce qui les attend.
Cette grande auge glaciaire garde les séquelles de l’époque lointaine où la pierre était rabotée par les mètres de glace qui s’écoulaient lentement. Sous Lélex, une moraine frontale se voit encore très bien, en travers de la vallée.

Je débouche à 13h40 à Lélex, dans le val de Mijoux. Viviane m’attend dans une rue parallèle.
Nous pique-niquons non loin de là, au bord de la Valserine. Nous y passons une partie de l’après-midi : baignade pour Oscar...

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Samedi 21 octobre 2000 : Lélex – les Trois Cheminées.

Depuis Lélex où Viviane m’a déposé à 16h avec Oscar, le GR 9, après avoir traversé la Valserine, va remonter vers l’ouest sur les flancs du crêt opposé.
C’est l’automne, avec sa luminosité caractéristique. Le GR rejoint dans les prés la ferme de la Fruitière, monte ensuite au lieu-dit la Croche. Il contourne la ferme et pénètre en forêt. Par un sentier en lacets, il grimpe progressivement jusqu’au belvédère du Truchet (1188 m). De là-haut, belle vue sur le val et les forêts jaunies accrochées aux flancs de la haute crête.


Le sentier se poursuit à travers forêt et clairière puis grimpe encore, pour revenir dans le département du Jura et atteindre le haut du crêt à 1270 m.
On accède alors aux Hautes combes. Douce luminosité d’un soleil couchant dans la teinte sombre des sapins…


On atteint le lieu-dit les Trois Cheminées (1230 m), à Bellecombe, commune sans village à l’habitat dispersé dans l’immensité du paysage. Viviane nous attend là, à 18h. Le soleil quitte peu à peu la combe.

Nous roulons avec le Trafic dans les Hautes combes pour chercher un endroit où dormir. Nous allons retourner au Chalet Vert où nous avions déjà passé la nuit le 7 septembre.

Dimanche 22 octobre 2000 : Les Trois Cheminées – poteau de Chalam.

Au matin, le soleil se lève sur le givre et la brume.



Nous rejoignons dans la matinée Bellecombe.

Une bonne piste empierrée continue vers le fond de la combe. Je la parcours avec Oscar. C’est une longue vallée aux coteaux de laquelle s’accrochent à espace régulier les solides bâtiments d’anciennes fermes isolées. Splendide !
Une course pédestre se prépare. Je passe devant le refuge de la Guienette (que nous connaissons pour y être déjà venus en réunion avec la Poste). Au fond de la combe, le GR monte vers le nord-ouest à travers le pâturage. Des coureurs commencent à me doubler. Belle vue en enfilade sur la combe.


On arrive après une maison en ruines au col des Salettes (1320 m). On descend à l’ouest à travers prés. Après un petit replat, on gagne le fond d’une combe parallèle, à la ferme la Morseline. Les versants non ensoleillés sont encore givrés.


Nous sommes rattrapés par la cohorte des coureurs. Oscar estime de son devoir de les accompagner, au besoin, de les gêner. Trompés et entraînés par le flux, on continue tout droit en même temps que les participants. Il nous faudra faire demi-tour jusqu’à la ferme.
On va s’orienter vers le sud-ouest pendant 3 km dans une superbe combe, d’abord très étroite puis qui va s’élargir, jusqu’à la grange à Malatrait. Après une dernière clôture, on débouche sur l’auberge du Berbois. Encore 500 mètres sur un lacet de la route, et on atteint le monument classé de la Borne au Lion, limite entre les départements du Jura et de l’Ain, les régions de Franche-Comté et de Rhône-Alpes.
Cette borne qui doit son nom au lion de la Comté gravé sur une de ses faces, au dos des lys de France, fut plantée là au XVIIe siècle en exécution d’un traité de paix parmi tant d’autres ! A la fin de la dernière guerre, elle assista à de furieux combats entre résistants et troupes d’occupation.
Panorama saisissant sur la profonde vallée de la Valserine.


Pénétrant dans l’Ain, on croise des chasseurs avec leurs chiens, on laisse un sentier qui grimpe au crêt de Chalam, et on descend en pente régulière sur un large chemin empierré. En cours de route, Viviane arrive à notre rencontre avec le Trafic. Nous rejoignons ensemble une route départementale, au poteau de Chalam.

Nous allons manger au soleil dans la nature, quelque part dans les Hautes combes.
Retour à St-Claude dans l’après-midi.

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Samedi 14 avril 2001 : Poteau de Chalam – Giron.

Week-end de Pâques.
Viviane nous laisse dans l’après-midi au poteau de Chalam.
Oscar et moi suivons un moment la petite route, puis nous pénétrons en forêt par un chemin empierré, encore enneigé. Une aubaine pour Oscar. On retrouve à nouveau une route goudronnée jusqu’au carrefour des Avalanches.
On se déroute sur une centaine de mètres pour atteindre un point de vue au-dessus du cirque des Avalanches : vaste panorama sur la vallée de la Valserine. Un garde-chasse du ministère de l’Environnement surveille la zone avec ses jumelles.
Le GR 9 gagne une jolie clairière ensoleillée mais ventée et se poursuit par un chemin de forêt toujours enneigé. Il atteint une nouvelle clairière où se dresse une bâtisse isolée, la « Maison Forestière » avant d’emprunter une route elle aussi forestière.
Oscar creuse dans le sol meuble d’un pré, déloge une taupe qui s’enfuit dans l’herbe, blessée à la gorge, pendant qu’il continue à fouiner. La bête n’y survit pas. Lorsqu’il l’aperçoit, il la saisit dans la gueule comme une peluche qu’il mâchouille. Il a compris mon intention : sur ses gardes, il me suit de loin, s’arrête, la saisit à nouveau dès que j’approche de lui. Il me faudra du temps pour que je parvienne à tromper sa vigilance.

On gagne alors une grande croix qui domine Giron, village dans les prairies au cœur d’une combe. Viviane nous attend là.
On va rester à cet endroit, sous la croix, pour la soirée et la nuit. Il fait beau mais froid. On mangera dans le Trafic.

Dimanche 15 avril 2001 : Giron.

Au réveil, il neige ! Le paysage est complètement bouché.
Après avoir déjeuné dans la camionnette, on décide de ne pas continuer.

Nous repartons à Saint-Claude dans la matinée.

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Samedi 12 mai 2001 : Giron – St-Germain-de-Joux.

Viviane nous dépose à la sortie du village de Giron à 16h. Le temps semble orageux. La verte prairie est parsemée de fleurs de pissenlits et de primevères. On poursuit dans la combe le long d’une petite route au milieu des prés. Balisage ancien, presque inexistant.
Puis la route quitte la zone des Hautes combes, entre en forêt, se poursuit par un chemin non goudronné. En cours de route, Oscar, attiré, fonce dans les taillis. J’entends un grognement. Le chien, interloqué, vient de débusquer un sanglier. Les bêtes s’observent. Le sanglier fait front. Je rappelle Oscar, quelque peu apeuré. La bête s’éloigne dans les fourrés…

Le GR entame sa descente vers la vallée de la Semine. On passe près d’une clairière ensoleillée, à 910 m, où l’on pourrait  revenir tout à l’heure. Nous retrouvons le goudron pendant 1,5 km ; nous débouchons dans des prés et descendons par un chemin en lacets.
En cours de route, nouvel incident : Oscar réitère le coup de la taupe avec un jeune merle qu’il attrape dans la haie, puis se sauve dans le pré adjacent avec l’oisillon qui piaille dans sa gueule. Sachant que je ne vais pas être content, il me suit à distance respectueuse, plongeant derrière la haie dès que je me retourne, bien conscient que je ne pourrai pas l’y suivre. Il va me falloir encore ruser pour lui faire oublier son oiseau. Là encore, le jeune merle n’a pas survécu. Oscar a droit à la raclée (symbolique !) et bien sûr à la laisse. C’est vrai que le printemps est propice à ce genre de situation. Il va me falloir être sur mes gardes désormais.
On arrive à Longefand, un hameau où nous attend Viviane, qui domine Saint-Germain-de-Joux. Nous sommes dans la cluse de Nantua, grande cassure latérale qui coupe le massif d’ouest en est. Ici se termine le parc naturel régional du Haut Jura.

Nous retournons en forêt avec le Trafic jusqu’à la clairière croisée tout à l’heure.
Nous allons y passer une agréable soirée, la table sortie au soleil avec un pastis bien frais…

Dimanche 13 mai 2001 : St-Germain-de-Joux – col de Cuvery.

Nous redescendons dans la matinée vers la bourgade.

Nous traversons St-Germain en Trafic pour remonter de l’autre côté de la vallée, le long de la RN 84. Viviane me dépose au-dessus de l’ouvrage d’un tunnel routier, d’où je vais repartir seul. Oscar a l’air déçu, mais je n’ai pas envie qu’il réitère ses exploits de la veille.

Il est 10h. Le GR 9 aborde maintenant le Bugey, extrémité méridionale du massif jurassien. Il fait beau et chaud. Pas un seul nuage en vue.
Le GR traverse une prairie, grimpe en forêt. L’altitude augmente, le sentier étroit s’élève à flanc, rejoint un plateau à la combe Fontenay. Je continue à monter, d’abord sur route puis par une piste forestière, pendant 3 km. Je rejoins la Lavanche, une ferme isolée à 1037 m, sur un très joli plateau lové dans un cirque rocheux, au pied du crêt de Beauregard. Je m’arrête sur un banc devant la ferme, pour me désaltérer. Des milliers de têtards nagent dans la fontaine…
Le GR grimpe ensuite à l’assaut de la falaise, sous couvert, et rejoint la Conay, petit refuge du C.A.F. Une procession de 4x4 ravage les chemins forestiers… Je poursuis dans une jolie combe. Des cavaliers me doublent, ainsi que des motos « vertes » : toujours aussi désastreux pour le sentier ! Je rencontre de plus en plus de promeneurs. Les jonquilles poussent dans la prairie, des gens pique-niquent sous les bosquets, profitant des premières belles journées d’un printemps pluvieux.
Je retrouve à 12h45 Viviane et Oscar au col de Cuvery (1165 m), sur la route départementale qui longe le plateau du Retord et où sont stationnées des cohortes de voitures. Trop de monde à notre goût pour rester sur place !

On monte dans le Trafic et on s’éloigne pour trouver à quelques kilomètres de là un endroit isolé pour pique-niquer. Nous allons passer toute l’après-midi dans la nature.

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Vendredi 22 mars 2002 : Col de Cuvery – col de Richemond.

Dix mois plus tard.
Parvenus la veille sur le plateau du Retord, nous avons dormi dans la nature, dans notre nouveau fourgon Boxer Peugeot, aménagé en camping-car.
Nous rejoignons le GR 9 au matin.

Il est 9h15. Viviane me dépose au col de Cuvery.
Je m’engage sur le haut plateau du Retord, immense espace de ski de fond et de randonnée à raquettes, hauteur plate coupée de quelques combes, entre 1000 et 1300 m d’altitude. Pour l’heure, le plateau est encore hivernal. Les sentiers sont recouverts par endroits de neige glacée.
Le GR 9 chemine dans un silence absolu sur les pâtures désertées par les troupeaux. Je passe devant quelques fermes abandonnées ou délaissées pendant l’hiver. L’occupation humaine se résume à des fermes éparses situées en général à plusieurs kilomètres l’une de l’autre. Seule la ferme du Retord, gîte d’étape et gîte équestre, semble habitée. Un chien pointe d’ailleurs le bout de son nez.
Le GR bifurque, rejoint une combe parallèle qu’il arpente dans sa longueur. Le calcaire affleure, d’un beau gris très clair. Je traverse les pâtures du syndicat agricole du Retord. Après la ferme le Tumet, le sentier s’élève sur un versant enneigé. La progression dans la neige devient difficile. Les chaussures s’enfoncent brusquement sous la mince couche glacée. Quand j’entre sous le couvert forestier, je chausse par deux fois les raquettes de neige que j’avais pris la précaution d’emporter dans le sac à dos. Par endroits, les raquettes raclent sur la rocaille lorsque la couche de neige est insuffisante. J’atteins le crêt du Nu (1351 m).
L’autre versant est moins enneigé. Je déchausse, et j’atteins à la sortie de la forêt une nouvelle zone de pâturages dans une combe.
Je mange assis sur un rocher, à la croisée des chemins. Casse-croûte frugal.
Le GR 9 se poursuit, gagne la croix des Terments. Il emprunte un chemin entre des haies, traverse à nouveau des pâturages, passe à proximité de Planvanel, une ferme d’accueil privée. Belle vue, au loin, sur le défilé de l’Ecluse où s’engouffre le Rhône.
Je navigue à vue dans une pâture. Après quelques erreurs de parcours, je retrouve une large piste forestière que j’emprunte pendant trois kilomètres. Je descends dans un talweg et j’arrive à 14h20 à proximité du col de Richemond où m’attendent Viviane et Oscar.

Nous roulons jusqu’à Champdor où nous nous installerons dans un camping municipal ouvert toute l’année.

Samedi 23 mars 2002 : Col de Richemond – le Grand Colombier.

Arrivés au col de Richemond à 10h20, nous remarquons un jeune chien de chasse qui erre sur la route et présente tous les symptômes d’un chien abandonné.
Lorsque Viviane me quitte, je m’engage vers le sud dans un chemin à découvert qui parcourt une combe. Je me retourne. Le chien m’a suivi de loin. Il se rapproche, s’arrête lorsque je m’arrête, puis petit à petit me rejoint, me double, s’apprivoise et ne me quitte plus. Joueur, il cherche le contact. Lors d’une pause entre deux combes, je partage avec lui mes barres de céréales.
On arpente de concert la combe Billon en un cheminement forestier. La neige encombre encore par moments le chemin, mais je n’utiliserai pas les raquettes aujourd’hui.  Avec mon compagnon, je parcours les pâtures de la combe Merlin. On remonte à 1230 m pour déboucher dans une clairière, au refuge de la Grange d’en haut, fermé.
Viviane et Oscar parviennent à notre rencontre. Les deux chiens se précipitent l’un vers l’autre et se lancent dans une sarabande sur les plaques de neige. On rejoint une route forestière qui traverse le massif, à proximité du col de la Biche.

Nous rejoignons le fourgon au col lui-même, un kilomètre plus haut. Viviane n’a pas osé avancer plus loin, de peur d’être coincée par la neige et la glace.
Et maintenant, que faire du chien ? L’abandonner à nouveau ? Nous le faisons monter dans le camping-car avec Oscar. Démarches à la gendarmerie et chez le maire d’un village voisin où nous le laissons. Dur ! Il m’avait déjà adopté.
On mange dans la nature, à l’intérieur du Boxer. Il fait beau mais le vent est froid. Viviane me ramène ensuite au col.

Je reprends la route à 15h. Je passe aux ruines de la Grange d’en bas, premier lieu d’implantation de la chartreuse d’Arvières. Je remonte alors le vallon d’Arvières jusqu’à la grange de Falavier. J’atteins les ruines de la chartreuse, agréable lieu de pique-nique réaménagé à côté d’un chalet.
Le GR s’attaque alors au flanc ouest des contreforts du Grand Colombier jusqu’au col de Charbemènes (1317 m). Je débouche au col battu par le vent, sur des prairies d’altitude : vue magnifique sur les chaînes enneigées des Alpes.
Le sentier va maintenant gravir une arête étroite et rocheuse. La neige réapparaît. 


Je monte dans une hêtraie torturée et j’atteins les pelouses du Grand Colombier. Un vent de nord-est souffle avec force. Le sommet est ensoleillé, couvert de plaques de neige. 


J’arrive à une table d’orientation, à la croix du Colombier (1525 m), promontoire méridional du massif jurassien dans l’Ain. Il me reste à descendre au col, en contrebas, à 1498 m, là où m’attendent calfeutrés Viviane et Oscar à 17h20.

Nous allons passer la nuit sur place. Le vent violent nous confine à l’intérieur du Boxer. Mais nous jouissons d’un panorama  de tout premier ordre sur les Alpes, le Mont Blanc, le lac du Bourget dans la vallée, et en premier plan la montagne du Gros Foug, plissement jurassien mourant sur la rive est du lac.
La tempête s’accentue à la tombée de la nuit. Dur de dormir. Le Boxer tangue comme un navire. Le vent s’engouffre dans les interstices, obligeant Oscar à nous rejoindre sur le lit.

Dimanche 24 mars 2002 : Le Grand Colombier – Vétrier.

Au matin, les vitres sont complètement glacées à l’extérieur comme à l’intérieur. C’est avec un chauffage à gaz portatif que je les dégivre !

Je vais tout de même devoir repartir. A 9h10, habillé comme au pôle sud (plusieurs épaisseurs de pulls, veste polaire, coupe-vent en gore-tex, sous-vêtements, capuche, bonnet, gants), je monte vers la crête au sud, sur une arête étroite. Le vent de nord-est est tellement violent qu’il me pousse vers les parois abruptes du versant ouest, difficilement retenu par mon bâton de marche utilisé comme une ancre. Je progresse de rochers en rochers, assis ou à quatre pattes, aux passages les plus risqués.
A hauteur de la pierre Fillole, le sentier descend à couvert, hors de la crête dangereuse. L’altitude baisse, le vent se calme. Je rejoins la route et m’engage dans une combe à l’abri du vent.
Je fais une pause à la grange à Masse et je commence à me déshabiller. Le soleil inonde la combe. Le sentier entre sous forêt, perd de l’altitude, jusqu’au point de vue du Fénestré. On est dimanche : quelques randonneurs montent en sens inverse.
J’entame alors une longue descente en lacets vers la vallée du Rhône, dans les buis qui réapparaissent. J’enlève mes dernières pelures et je termine en tee-shirt. Des randonneurs me demandent s’il y a encore de la neige là-haut. Oui, mais ce n’est pas le plus grave !
J’atteins au pied de la montagne un gîte d’étape, à l’entrée de Culoz. Là je retrouve Viviane à 12h45. Nous mangeons dans le fourgon.

Nous traversons ensuite la ville en voiture jusqu’au bord du Rhône.
A 14h10, je continue à pied, cette fois avec Oscar. Petit sac à dos allégé.
Nous traversons le Rhône sur le pont de la Loi. Le fleuve, dans sa traversée du massif jurassien, marque ici la limite entre le département de l’Ain et le département de Savoie, séparant le Bugey du Jura savoyard. Pénétrant en Savoie, le GR 9 rencontre sous les marches du pont, au bord de l’eau, le GR 65 (Genève – Roncevaux), l’une des voies du chemin de pèlerinage de St-Jacques-de-Compostelle, avec lequel il va faire trajet commun.
L’itinéraire emprunte maintenant les berges du Rhône, zone inondable. Changement complet de paysage. On chemine dans une forêt de printemps vert tendre entre fleuve et gravières. Des bouquets de primevères acaules fleurissent sur les bas côtés.
Nous bifurquons entre deux bassins de gravières sur une digue boisée. Des rousserolles sautillent dans la roselière. Oscar en profite pour aller nager. Nous arrivons près d’une zone de loisirs, l’étang Bleu ; nous passons sous le viaduc d’une voie ferrée et  poursuivons sur une digue le long du Rhône. Beaucoup de promeneurs. Des grands cormorans font sécher leurs ailes sur un arbre mort au milieu du fleuve en compagnie de goélands.
On atteint le port de loisirs de Chanaz ; on passe devant le terrain de camping (ouvert) ; et par un pont piétonnier on entre dans Chanaz, petite bourgade touristique, au bord du canal de Savières qui relie le Rhône au lac du Bourget.
Les deux GR s’engagent sur les collines avoisinantes, cheminent plein sud sur un petit plateau qui domine le fleuve (ancienne voie romaine). Passant devant un oratoire, on poursuit à travers la campagne jusqu’à une vieille ferme et l’on remonte jusqu’au hameau de Vétrier.

Retrouvant Viviane à 17h30, nous revenons à Chanaz, au camping croisé tout à l’heure, déjà ouvert pour les habitués du week-end. Il subsiste tout de même un espace pour les gens de passage !

Lundi 25 mars 2002 : Vétrier – Yenne.

Ce matin, je reprends la route avec Oscar.
Après Vétrier, on longe sur la colline un premier vignoble savoyard. On descend vers le hameau de Montagnin. Plus loin, on passe à côté d’une roselière : un panneau explique le curieux mariage entre lieux humides et vignes. Succession de hameaux viticoles, dans un paysage ouvert de vignes : Vraisin, sur une colline ; Barcontian puis Aimavigne, sur le piémont. Coupant les lacets de la route, l’itinéraire monte vers l’église de Jongieux, le chef-lieu de la commune. Partout les caves des vins de Savoie invitent à la visite.
Un chemin nous mène à la chapelle de la butte St Romain. 


Là nous quittons le vignoble et nous rejoignons une falaise. Un étroit sentier dans les buis passe à côté d’un calvaire et redescend en lacets dans la vallée du Rhône.
On retrouve Viviane à 13h15, à hauteur du hameau de Petit-Lagneux. On mange dans le fourgon aux abords d’un champ.

Je repars seul à 14h30. Coupant la route départementale, je m’engage dans des champs de maïs encore nus, et je rejoins le Rhône. Le sentier se poursuit en une promenade sur les berges du fleuve, avec des panneaux d’information sur la faune, la flore et l’histoire du Rhône. Il y a beaucoup de ressemblance avec les forêts rhénanes. L’ail des ours, avec ses feuilles imitation muguet, pousse dans le sous-bois en un parterre odorant qui annonce la pousse des fleurs. La forêt entière va bientôt sentir l’ail… Sur les eaux calmes autour des lônes, antiques bras du fleuve, des harles bièvres se reposent.
Il est 16h lorsque j’arrive à Yenne. Je retrouve Viviane et Oscar à l’entrée du camping (fermé).

Nous retournons dans l’Ain pour passer la soirée dans un camping qui ouvre ses portes, à  Massignieu-de-Rives, au bord du lac du Lit du Roi.